Dans notre société du savoir et de l’abondance, de plus en plus de parents et d’éducateurs se sentent obligés de jouer leur rôle à la perfection ainsi que d’offrir aux enfants un monde de rêve.
Pourtant, les enfants ont surtout besoin de modèles authentiques et réalistes et donc imparfaits car tout être humain fait des erreurs et la réalité comporte des failles et des limites.
Si l’imaginaire est un outil fabuleux pour aider les enfants à appréhender la complexité du réel, leur inventer un monde d’illusions ne fait que restreindre leur compréhension et leur capacité à « faire partie de la solution » aux problèmes de notre siècle.
Il est humain et normal de vouloir « protéger » son enfant par peur de le voir se blesser physiquement ou émotionnellement et donc de tenter de contrôler la plupart des risques. En revanche, quand on « surprotège » ou « surcontrôle » un enfant, on lui transmet nos malaises, en plus de l’empêcher d’affronter ses peurs et ses défis, de prendre des initiatives, de faire des erreurs, de développer sa créativité, de même que de résoudre ses problèmes par lui-même.
Pourtant, tout cela est primordial pour devenir un être humain autonome, capable de faire des choix, d’entreprendre et de mener à terme une activité ou un projet, de s’adapter à différentes situations, de se relever après un échec, et de trouver des solutions face aux obstacles qui se présenteront inévitablement.
De même quand on traite nos enfants comme des rois ou des reines, en désirant leur offrir quotidiennement ce qu’il y a de mieux, en remplissant leur temps et leur environnement, en ne refusant rien… quelquefois pour « acheter la paix », on risque de corrompre leur humanité, de les rendre égocentriques, incapables de dépasser les apparences. Nous les empêchons d’accepter les limites et les délais de gratification. Nous étouffons leur curiosité et leur sens de l’exploration, qualité essentielle pour jouer, apprendre et tisser des liens.
Les enfants, petits et grands, ont besoin de côtoyer des modèles imparfaits qui font parfois des erreurs. Et c’est encore mieux, si ces modèles sont humbles, astucieux et bienveillants, puisqu’ils sauront leur apprendre à reconnaître leurs erreurs, à en rire, à en tirer profit et à pardonner à soi-même et aux autres. Quand, en plus, ces modèles prennent le temps de communiquer leur ressenti et leurs besoins, c’est remarquable d’efficacité en terme d’éducation et de croissance.
Enfin, comme « il faut tout un village pour élever un enfant », l’éducation des enfants devrait être partagée collectivement. Pour construire leur identité personnelle, sociale et culturelle, les enfants ont besoin de voir et d’entendre des personnes différentes et d’interagir avec elles. Aller à la rencontre des autres est un excellent moyen pour se connaître. Si, en plus, cette rencontre se joue dans un contexte de non-jugement et d’écoute, ils courent la chance de devenir des citoyens ouverts d’esprit, compréhensifs et socialement engagés.
N’hésitons pas à leur donner cette chance.
Marie-Chantal DANIEL
Extraits d’un article d’Emmanuelle Jasmin, ergothérapeute et professeure au Québec.